/image%2F0179068%2F201303%2Fob_5184edc8b14904093ea3e0dcb98dd04f_popularite-prepa.jpg)
Les chiffres publiés récemment sur la structure sociale des étudiants de prépa interrogent une nouvelle fois. La prépa est-elle trop élitiste ? Revoyons ici la question en détail et demandons-nous si la prépa ne fait pas plutôt office de bouc émissaire dans un système d’éducation global qui a tendance à reproduire les élites.
Des chiffres qui n’évoluent pas
Le constat n’évolue plus depuis plus de 10 ans. En 2001, les étudiants de CPGE (Classes Préparatoires aux Grandes Écoles) venaient à 51% d’un milieu favorisé alors que seuls 12% d’entre eux étaient enfants d’ouvriers, d’inactifs ou de retraités. Malgré les déclarations gouvernementales, les publicités des plus grandes écoles pour leurs systèmes de bourses (HEC, ESSEC) ou les programmes ZEP (Sciences Po), les chiffres stagnent désespérément. La proportion d’élèves issus de milieux populaires reste de 12%.
Le système de la prépa n’est pas responsable
Au vu de ces chiffres, le premier réflexe des observateurs est toujours de remettre en cause le système des prépas : un système injuste et élitiste, s’exclame-t-on.
Mais à bien y réfléchir, il est difficile de comprendre en quoi les classes préparatoires favorisent l’inégalité des chances. La responsabilité semble plutôt à chercher de part et d’autre de la prépa : dans le système d’orientation au lycée et dans les politiques des écoles de commerce.
En effet, d’un strict point de vue financier, la prépa n’est pas vraiment discriminante. Il existe de très nombreuses prépas publiques auxquelles l’accès est parfaitement gratuit. Même si les classes prépa sont rattachées au système universitaire et que les étudiants doivent payer des frais de scolarité, le coût ne sera pas socialement discriminant.
Un problème d’orientation, d’information et d’autocensure
Le problème principal vient à mon sens plutôt de l’orientation des étudiants. En effet, ce que dit ce chiffre de 12%, ce n’est pas que les enfants issus de milieux populaires ne réussissent pas en prépa mais qu’ils n’essaient même pas !
Les freins sont les suivants :
- Un système de bourse dans les écoles de commerce pas assez performant ou pas assez connu : les étudiants pensent que même s’ils réussissent, ils n’auront pas les moyens de payer les frais de scolarité
- Un manque d’information sur cette orientation : un grand nombre d’élèves issus de ZEP ne savent même pas que la prépa est une option
- Une carte scolaire trop stricte : les meilleurs éléments des collèges les moins cotés devraient pouvoir être orientés dès le lycée vers des établissements plus performants qui les prépareraient à des études prestigieuses.
- Last but not least, l’autocensure : de nombreux étudiants pensent ne pas être capables d’intégrer une prépa ou d’y réussir les concours. Il existe aussi de nombreux témoignages d’étudiants qui déclarent que leurs professeurs les ont dissuadés de tenter l’expérience prépa.
A ce titre, on peut se demander si le programme CEP de Sciences Po, qui partait d’une bonne intention, n’a pas envoyé un mauvais message aux étudiants. En créant une voix d’accès parallèle qui leur est entièrement dédiée, Sciences Po n’accrédite-t-elle pas l’idée qu’ils sont incapables de réussir comme les autres ?
Il n’y a évidemment pas de solution simple pour remédier à ces problèmes mais plutôt que de vouloir perpétuellement stigmatiser la prépa, les pouvoirs publics devraient plutôt se pencher sur des campagnes d’information et d’orientation plus performantes. Si les étudiants issus de milieux populaires tentaient plus leur chance, ils bouleverseraient à coup sûr la reproduction des élites.