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La publication de deux classements internationaux éclaire d’un jour nouveau les discussions sur l’état de l’enseignement supérieur français, notamment les positionnements respectifs de l’Université et des Grandes Ecoles.
Classement de Shanghai et Alma Mater Index Global Executives
D’un côté les universités françaises occupent une place marginale dans le fameux classement des Universités de Shanghai, écrasées une fois de plus par les Américains. Seuls quatre établissements se classent dans le Top 100 mondial, le premier étant classé à la 37ème place (L’Institut Pierre et Marie Curie).
De l’autre, la revue Time Higher Education publie The Alma Mater Index Global Executives qui classe 3 grandes écoles françaises (Polytechnique, HEC et ENA) parmi les 6 meilleurs établissements mondiaux pour former les dirigeants. Dans les 100 premiers, on compte 8 écoles françaises. Un score plus qu’honorable…
Comment expliquer ces résultats paradoxaux ?
Des critères différents et parfois peu pertinents
Le classement de Shanghai est le plus polémique et sans doute le plus discutable. Basé sur le nombre de prix Nobel, de Médaille Fields et d’articles de recherche publiés dans les revues anglo-saxonnes, il favorise de façon très excessive les Universités américaines et britanniques. Il n’y a vraiment pas grand-chose d’autre à en conclure que les Universités françaises ont peine à être compétitives sur le terrain de la recherche internationale.
Le classement de l’Alma Mater Index nous intéresse plus car il repose sur un critère qui le rend plus à même de juger l’enseignement : le nombre de dirigeants de grandes entreprises qui sont diplômés de l’une ou l’autre école. Si cela confirme la capacité française à former les élites, même sur la scène internationale, cela montre également les insuffisances du système universitaire sur celui des grandes écoles.
En effet, les 8 établissements du top 100 sont des grandes écoles : Polytechnique, HEC, ENA, INSEAD, Mines ParisTech, Sciences Po, Ecole des Ponts ParisTech et l’ESSEC. Aucune université…
Un enseignement inadapté au monde professionnel
Il ne faut bien entendu pas généraliser. Dans certains domaines, comme la médecine ou le droit par exemple, les universités françaises restent des références incontournables. Toutefois, ne faut-il pas s’alarmer que la faculté soit aussi inapte à former les élites économiques et politiques de notre pays, et encore moins du monde.
Sans aller jusqu’à la formation d’un futur patron du CAC 40, on s’aperçoit que l’enseignement dispensé à l’université prépare très mal les étudiants à leur entrée sur le monde du travail, un domaine où excellent les grandes écoles et qui s’avère d’autant plus important sur un marché du travail rendu très concurrentiel par la crise.
Nous livrons ici quelques réflexions sur les dysfonctionnements du système universitaire :
- L’absence totale de sélection en première année : cela crée des promotions absurdement grandes dans certaines filières (sociologie, psychologie, avec très peu de débouchés en fin de cursus par exemple), des taux d’échecs très importants après la 1ère année et des étudiants peu habitués à des standards de sélection élevés et bien présents dans le monde de l’entreprise.
- Aucune préparation à l’entrée sur le marché du travail : la plupart des étudiants sortant de la fac ne savent pas faire un CV et encore moins comment se comporter au cours d’un entretien d’embauche.
- L’état de délabrement avancé de la plupart des universités qui mettent les étudiants dans des conditions de travail déplorables.
- La lourdeur administrative de la plupart des établissements qui rend ces institutions incroyablement résistantes à toute tentative de changement ou de modernisation (rappelons-nous de l’affaire de l’enseignement en anglais).
La faculté française, dans son état actuel, semble donc bien plus performante pour former des fonctionnaires que les cadres du futur.
Une mentalité bien française
Pour être juste, il faut admettre que les problèmes d’employabilité des étudiants sortant de l’Université ne sont pas exclusivement intrinsèques et qu’une certaine fermeture d’esprit du monde économique français n’y est pas étrangère.
En effet, dans la plupart des pays anglo-saxons, les diplômes en sciences humaines sont généralement considérés à l’égal des diplômes en management et offrent des débouchés professionnels intéressants. Il n’est ainsi pas rare de voir des profils très littéraires, par exemple, entamer leur vie professionnelle dans la finance à Londres.
Cette mentalité bien française de l’hyper-spécialisation se retrouve à tous les étages de la vie professionnelle et contribue largement à créer un marché du travail très peu flexible. Le patron d’un institut de sondage américain nous indiquait il y a quelques années qu’un Américain changeait d’orientation environ 5 fois dans une carrière ; un Français, une ou deux fois…
Quand est-ce qu’on réforme ?